Après la première intervention télévisée d'Emmanuel Macron
sur le coronavirus, on a entendu de doctes Diafoirus de la communication nous
expliquer qu'il aurait dû, pour être mieux compris, utiliser le terme de
"confinement", mot qu'il avait eu la mauvaise idée, selon eux, de ne
pas prononcer. Cette critique était on ne peut plus malvenue.
Les mots ont un sens, dans l'esprit de chacun de
nous, qui résulte soit de notre expérience personnelle, soit de
l'endoctrinement dont nous avons été l'objet. Ainsi, peu de mots abstraits
peuvent se targuer d'être compris mêmement par tous.
Naguère, si vous parliez de confinement à un médecin, il entendait
l'interdiction faite à un malade de quitter sa chambre ; à un biologiste, il
pensait au maintien d'un animal, d'un végétal, ou d'une espèce, dans un milieu restreint ; à
un ingénieur nucléaire, la notion qui lui venait à l'esprit était celle de l'enceinte,
en principe infranchissable, qui sépare le cœur du réacteur du monde extérieur
; à un gardien de prison, il lui venait l'image d'une cellule d'isolement ; à
une militante féministe, elle voyait l'impossibilité pour une femme
d'échapper aux tâches et aux fonctions auxquelles la tradition l'a assignée ; à
un militant d'extrême-droite, il imaginait dé-mondialisation et fermeture des
frontières nationales.
Ces notions peuvent certes toutes se ramener à une seule :
l'assignation à résidence à l'intérieur d'une délimitation de l'espace (physique
ou mental) dont le franchissement est impossible ou condamnable. L'enfermement,
avec un dedans et un dehors. Le confinement, c'était l'image de la forteresse,
celle où l'on se défend contre ses ennemis, ou celle où l'on enferme les
criminels. Mais chacun voyait le midi du confinement à sa porte.
Et voici que, par le miracle du coronavirus, le mot confinement aura acquis une
signification nouvelle et partagée par tous. Ironiquement, le coronavirus aura adouci
la rigueur intransigeante qui, dans la quasi-totalité de nos imaginaires, était
associée à ce mot. Nous savons maintenant qu'un confinement, ce n'est, tout bien pesé, qu'une règle de principe,
stricte mais souple, assortie de toutes sortes d'exceptions, d'exemptions, de laissez-passer
... mais qui, par dessus tout, n'a d'autre fonction que de protéger du malheur ceux du dedans et ceux du dehors.
Une règle humaine, en quelque sorte. Pour les inhumaines, il va falloir trouver un autre mot.
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